DES SECRETS BIEN GARDÉS
Un plan type
A propos
« L’Administration des forêts a toujours considéré la construction de maisons forestières comme indispensable pour assurer, en même temps que la répression des délits, la surveillance incessante des exploitations et des travaux.
L’installation de ces maisons a aussi pour résultat d’améliorer le sort des préposés et par conséquent, d’attacher à leur fonction, ces utiles serviteurs de l’État. »
Le prix total moyen de la maison type, en 1878 est de 7550 francs pour l’habitation complète et de 6340 francs seulement pour le bâtiment principal. (Extrait du catalogue raisonné des collections exposées par l’Administration des forêts, lors de l’Exposition universelle de 1878). Ce bâtiment, présentant une superficie disponible de 260 mètres carrés, murs non compris, le prix de revient au mètre carré n’est que de 24 fr 20 cent.
En 1878 l’Administration possède 2537 maisons forestières et poursuit dans les limites de son budget, la construction de nouveaux postes pour les 1717 préposés qui ne sont pas encore logés à l’époque.
À Bercé c’est au tout début du XIXème siècle, sous le premier empire de Napoléon que fut instaurée une véritable politique de logement du personnel. L’administration napoléonienne des forêts était beaucoup plus solide que celle de la Révolution.
Et c’est donc sous la Restauration que la plus part de nos maisons à Bercé furent élevées : des maisons caractéristiques, dont l’allure rappelle celle des maisons éclusières.
L’administration des Eaux et forêts édifia très tôt ses premiers plans types et donna ses premières consignes générales, mais très précises, de construction.
Les bâtiments devaient ainsi être élevées dans un lieu sain et aéré, de préférence dans les vallées et les terrains les plus fertiles, à distance des arbres pour limiter l’humidité.
Mais il fallait également les protéger des vents du nord.
Règles générales d’implantation
L’habitation pour la quelle était fourni un plan type, disposait impérativement d’un point d’eau : source, citerne, mare ou puits.
Afin de protéger la demeure de l’humidité remontant de la terre, les Eaux et forêts préconisaient de surélever le niveau du sol de 50 centimètres, voire plus en cas de terrain particulière ment humide, limitant la dénivellation à trois ou quatre marches, d’où ces petits perrons d’accès que l’on rencontre devant chaque maison au milieu de la façade.
Toutes les maisons, à l’origine sans autre isolation que celle de la grande épaisseur des murs (pierres et moellons de la forêt) sont donc généralement construites sur un même plan.
Bref, l’implantation, les fondations, les dimensions, tout était fixé à l’avance.
La circulaire précisait que :
“l’épaisseur des murs, les cloisons, les encadrements des portes et des fenêtres, la couverture des bâtiments et par suite la charpente pourront être modifiés en raison de la nature des matériaux employés dans les localités."
D’autant que c’étaient les entrepreneurs locaux qui se chargeaient eux-mêmes de mettre en œuvre les plans de l’Administration.
Chaque région possédait donc ses particularités architecturales.
Des aménagements complémentaires étaient possibles, avec l’accord de l’Administration, tel celui du grenier ou de toute autre pièce, afin de créer un «logement de passage». Il s’agissait en fait d’une chambre, meublée aux frais de l’Administration, mise à disposition des inspecteurs en tour née ou préposés en mission ponctuelle. De plus, la présence de «Monsieur l’inspecteur» chez les gardes permettait d’adoucir les rigueurs de la hiérarchie…
L’achat du Pavillon des officiers, en 1891 règlera définitivement cet aspect d’une cohabitation pas forcement désirée.
Une administration paternaliste.
La maison forestière, administrativement, est un abri permettant «…l’épanouissement de la vie familiale et l’accomplissement aisé de tous les travaux ménagers». Dans cet ordre d’idées tout à fait paternaliste, la maison est prévue sans étage «…afin d’éviter toute fatigue inutile à la mère de famille».
En outre, «…les conditions de vie du préposé forestier faisant
généralement obstacle au maintien du logis en bon état de propreté.
(… ) Il est donc conseillé d'établir un petit vestibule d'entrée à
proximité immédiate d'une salle d'eau ou bien de doter cette
dernière d'une entrée particulière. (… ) Les cuisines devront
être étudiées en tenant compte des familles nombreuses, des
opérations culinaires plus complètes (charcuterie, conserves
de fruits et de légumes) ; enfin, la préparation des produits
du jardin nécessite un nettoyage inconnu à la ville».
L'Administration prévoyait dès le départ de nombreuses annexes:
« étable, porcherie, clapier, poulailler, chenil, fenil, fumière,
hangar, four, bûcher, buanderie, écurie... »
Elle permettait des compensations en nature pour un personnel
aux revenus plutôt modestes, comme la gratuité du bois de chauffage,
le droit au pâturage en forêt et au ramassage de l'herbe pour l'hiver.
Certaines annexes ont disparu, d'autres ont été transformées
en atelier, remise ou garage, mais le « terrain de service »
existe toujours.Un terrain de 50 ares, porté à l hectare en 1856,
générale ment situé à côté de la maison, permettait de satisfaire
la consommation familiale. Il est encore attribué au garde qui doit
le gérer « en bon père de famille » ….exactement comme le logement
… du reste.
Certes, aujourd’hui, les forestiers ne s'en servent plus
vraiment pour y produire de quoi nourrir leur maisonnée, mais ces
prairies sont au tant de zones tampons servant de gagnage au grand gibier.
Des familles bien implantées :
10 maisons, c’est sur une période de 50 ans seulement, de 1900 à 1950, plus de 50 forestiers qui veilleront successivement sur Bercé.
Certains feront souche par le biais du mariage, d’autres, soit réfractaires à l’autorité ou au climat, soit nostalgiques de leur région d’origine, ne feront pas de vieux os à Bercé. Telle l’histoire du garde Césari, ce Corse arrivé à contrecœur sur Bercé.
Noms de baptême des maisons
La règle :
Un cartouche établi par les soins de l’administration indiquera que cette maison est une maison forestière, en plus de l’appellation de celle-ci, qui sera discrète. La maison pourra être appelée du nom du lieu- dit du cadastre où elle sera édifiée.
Cantons, château, fermes, donnent ainsi leur nom aux maisons, nom qui s’inscrit en grosses lettres sur le front de celles-ci. Ces plaques de baptême en fonte, vissées au dessus de la porte d’entrée, agissent sûrement beaucoup dans le charme que ces maisons des bois exercent sur tous …
Avantage pour la région, outre la pierre abondante, la brique est omniprésente en bordure de forêt.
Autres articles concernant les maisons forestières :
Maison forestière des Profonds-Vaux
Maison forestière des Boussions
Maison forestière de la Doucinière
Maison forestière de la Huberdière
Maison forestière des Hutteries
Maison forestière des Renardières
Bibliographie :
Revue Au Fil du temps N° 22 - Pages 5 à 7 (Y. Gouchet - 12 -2003)
L’Or Vert de la Sarthe aux éditions de la Reinette (2007 - Traces - Yves Gouchet )