DES SECRETS BIEN GARDÉS
Bois chantant
Sur la piste du bois chantant
Cette énigme “du bois qui parle”, est partie des Deux-Sèvres!
Procédant au dépouillement des registres paroissiaux d’Azay-sur-Thouet, un adhérent de GENEA 79, (n°35 page 9) a eu la surprise de trouver plusieurs actes mentionnant un commerce pratiqué au XVIIème siècle dans cette paroisse de Gâtine, celui du «bois chantant».
On trouve ainsi trace de marchands de bois chantant.
Un acheteur de bois chantant est venu du diocèse du Mans pour en acheter, preuve que ce bois était peut-être d’une espèce endémique. Nous avons consulté les dictionnaires et autres ouvrages traitant des vieux métiers et des termes de vocabulaire du passé. Malheureusement, les investigations menées pour savoir ce qu’était ce bois chantant n’ont pour l’instant rien donné. Nous lançons donc un appel, espérant pouvoir publier la solution dans notre prochain numéro.
21 avril 1651.
Inhumation d’un acheteur de bois chantant originaire de la Sarthe à Azay/Thouet.
"Le vingt et ung Apvril mil six cent cinq(uan)te
et ung a esté Inhumé dans le Cimetière de ce lieu
le Corps de Urbain Leroy de la parr(oisse)
de Quinquenpoix dioceze du Mans leq(ue)l
tomba malade et moureut en la maison de Me
Jehan Logeay cheux leq(ue)l il estoit
venu p(ou)r acheter du bois Chantant par moy"
A sabiron pbre Curé
6 mars 1664.
Inhumation d’un autre marchand de bois chantant sur Azay.
sixie(me) mars mil six cens soixante quattre
Sire Jean (...) marchand de bois Chantant dem(euran)t
au bourg d'Azay a este enterre par moy pbre cure d azay
Caffoireau
22 juin 1664
Mariage d’un marchand de bois chantant.
Le vingt deuxi(eme) Jour de Juin 1664 a esté espouze en face de N(otre) M(ere) S(ainte) Esglise Jacques Rousseau marchand de bois Chantant avecq Mathurine Perrotin ve(uve) de Mathurin vequault tous deux de cette par(oisse) es p(rese)nces et du consentement de leurs proches parens et amis, de Mathurin Rousseau frère dud Jacques de Magdelaine Rousseau sa sœur, de pierre perrotin oncle de lad mathurine et d hilaire perrotin sa sœur et au(tr)es qui ont dit le ne Scavoir par moy pbre cure d azay Caffoireau
Jeanne Sérafin du Cercle Généalogique du Sud Saintonge de Montendre (Charentes) indique dans GENEA 79 (n° 38 pages 3 et 4) que Pierre HELIS et son frère Jean, avaient été tourneurs de bois chantant dans la paroisse de Pommiers, près de Montendre, au 18e siècle. Nous apprenions ainsi que le mystérieux métier s’était pratiqué en Sud-Saintonge, alors qu’on l’avait initialement découvert à Azay–sur-Thouet au 17e siècle.
René Geay, afin de faire avancer le dossier, a joint un de ses amis, originaire d’une commune située près de Flée, dont dépendait l’ancienne paroisse de Quinquempoix.
Cet ami c’est Robert Rousselle, Technicien supérieur aux Ponts et Chaussées, ayant œuvré durant 22 ans à l’usine atomique de Marcoule (Gard). En 1982 il rejoint avec Thérèse le Grand-Lucé pour une retraite bien méritée.
Hélas cet amoureux d’histoire et de jardin quitta prématurément sa famille en juin 2002.
Peu de temps avant, le 9 août 2001, il m’envoyait cette énigme…..
Connaissez-vous le bois chantant ?
Je lui répondis par retour de courrier, en soulignant que cette énigme permet à l’histoire locale de progresser dans sa quête du savoir :
Quincampoix, village autrefois important, situé au coeur du croissant forestier de Bercé, est réduit aujourd’hui à l’état d’un hameau, presque sans vie.
Urbain Leroy, marchand de « bois chantant » est de ceux qui recherchaient pour les facteurs d’instruments de musique les bois dits de résonance. Ces bois aux qualités technologiques parfaites (sans noeuds) poussaient en général sur des sols pauvres chimiquement, leur assurant une croissance lente et régulière, donc un grain très fin, à l’image de nos chênes de Bercé (1,2 mm sur le rayon, mais pourtant les plus hauts de France).
Il y avait donc du côté de Parthenay une production forestière intéressante, car particulière. Il s’agissait de bois serrés, ayant au taper une résonance importante, qui étaient choisis pour cette qualité unique et recherchée par tous les facteurs d’instruments.
Ces bois poussent sur des stations géologiques bien particulières. Cette production de bois qui doivent être parfaitement secs concerne le merisier (pour les tables d’harmonie et les caisses d’instruments), l’érable ondé (pour les violons), le hêtre (pour le sommet des chevilles de piano), le tilleul (pour les touches de piano) et en altitude l’épicéa. Le charme et le chêne trouvent aussi leur place dans un piano ou un clavecin.
Reste à savoir, si du côté d’Azay sur Thouet une pareille production forestière est encore d’actualité et s’il existe encore des essences de ces bois particuliers.
René Geay a depuis contacté l’Institut Technologique Européen des Métiers de la Musique, basé au Mans. Cet institut effectuerait une recherche afin de déterminer et localiser les artisans des métiers de la musique aux siècles passés.
Quand le bois chante c’est la phase délicate où le “maître " accorde son instrument et fait que le “bois parle”, que les notes s’élèvent graves ou gaies … Afin de savoir si le bois est assez sec, pour le travailler il faut taper deux bûches l’une contre l’autre et écouter si leur choc émet un son « chantant ».
Autres articles concernant les productions forestières:
Bibliographie :
Revue Au Fil du Temps N° 38 Pages 36 à 37 (Y. Gouchet – 01/2008)